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Historique

HISTORIQUE

En 1911, deux ans après avoir réussi la liquéfaction de l'Hélium - atteignant alors la plus basse température connue : 4,2 Kelvin (K), c'est-à-dire -269 °C - le physicien Heike Kamerlingh Onnes proposa à son élève Gilles Holst de mesurer la résistivité d'un barreau de mercure. Ils découvrirent que celle-ci s'annulait en dessous de 4,15 K. Holst fit et refit les expériences, vérifia les instruments de mesure mais le doute n'était plus permis : le comportement se confirmait.

Heinke Kammerling Onnes

Heike Kamerling Onnes

L'année suivante, Onnes découvrit que l'étain et le plomb (qui est un très mauvais conducteur à température ambiante), perdaient leur résistance respectivement à 3,7 K et 6 K. L'absence de résistivité du matériau, c'est-à-dire que celle-ci ne soit ni faible ni très faible mais totalement absente, est le premier phénomène spectaculaire de la supraconductivité.

En 1933, W. Meissner et R. Oschenfeld découvrirent la propriété d'un barreau de métal pur à être imperméable aux champs magnétiques : le diamagnétisme parfait, que l'on appelle depuis effet Meissner. Ce diamagnétisme, qui est le second effet surprenant de la supraconductivité, se traduit par la capacité d'un supraconducteur à émettre un champ magnétique opposé à un autre champ qui lui serait appliqué, et ce , quelle que soit la polarité du champ appliqué.

Sans aucune théorie sur laquelle s'appuyer, les chercheurs durent se contenter d'expérimenter, presque au hasard, différents alliages à base de titane, de strontium, de germanium et surtout de niobium, qui donnait les meilleurs résultats. Des recherches furent même menées dans le domaine des molécules organiques, essentiellement avec les fullerènes ou footballènes, avec des températures de l'ordre de 33 K.

La question de l'origine de la supraconductivité hantait les scientifiques : « D'où vient ce phénomène qu'aucune théorie n'avait soupçonné auparavant ? » En 1935, des théories incomplètes bien que puissantes furent proposées par les frères London puis en 1950 par V. Ginzburg et L. Landau.

BCS

John Bardeen, Leon Neil Cooper, John Robert Schrieffer

Mais en 1957, apparut la théorie B.C.S, du nom de ses découvreurs John Bardeen, Leon Cooper et John Schiffer, qui décrivait en partie le principe fondamental de la supraconductivité. Cette théorie, que nous expliciterons dans la suite de ce projet, stipule qu'à basse température, les électrons se déplacent par paires, appelées paires de Cooper, sous la forme de phonons. C'est grâce à cette théorie de base que les chercheurs ont pu progresser dans leur recherche de matériaux supraconducteurs à « haute température ». Les alliages contenant du Niobium se révélant les plus efficaces, on l'utilisa donc dans la majorité des composés supraconducteurs. Malheureusement, tous les alliages testés ne dépassaient pas une température supérieure à 23 K et la théorie B.C.S semblait avoir trouvé ses limites.

Parallèlement à ces recherches, Brian Josephson prédit en 1962 les effets quantiques qui portent son nom et sont utilisés en détection ultrasensible des champs magnétiques. La découverte de Josephson, qui laissa pantois tous les chercheurs, explique qu'un courant électrique non nul pouvait circuler d'un bloc supraconducteur à un autre bloc supraconducteur séparé du premier par une mince couche isolante, en l'absence même de différence de potentiel entre les deux blocs. Cette théorie fut vérifiée expérimentalement quelques années plus tard, ce qui valut à Josephson et Giaver de recevoir le prix Nobel en 1974.

Brian Josephson

Brian Josephson

C'est en 1986, année charnière dans l'histoire des supraconducteurs, que la théorie B.C.S fut remise en cause, avec la découverte, par des ingénieurs d'IBM Zurich (Suisse), d'un supraconducteur à 34 K puis, neuf mois plus tard, à 92 K. Ainsi virent le jour de nouvelles générations de composés tels que Ba-La-Cu-O, Y-Ba-Cu-O et Ti-Sr-Ca-Cu-O, les deux derniers permettant de dépasser la température de l'azote liquide (77 K, soit -196 °C), coûtant dix fois moins cher que l'hélium liquide et refroidissant vingt fois mieux. Ainsi Ti-Sr-Ca-Cu-O atteignait une température critique de 125 K, laissant loin derrière la barrière psychologique de liquéfaction l'azote liquide.

Cette découverte suscita l'engouement de toute la communauté scientifique, qui repartit dans la course aux supraconducteurs à « Haute Température Critique (H Tc)», espérant alors découvrir un supraconducteur à température ambiante. Mais plus cette température augmentait et plus les performances des matériaux diminuaient, le courant pouvant être transporté sans déperditions devenant faible. Le record de température critique reproductible fut atteint en 1995 avec une température de 164 K mais nécessitant de hautes pressions.

La course aux Tc s'essoufflant faute de compréhension au niveau atomique, les recherches se sont donc orientées vers la compréhension des phénomènes physiques régissant la supraconductivité. Cette nouvelle recherche conduit à des théories qu'il est actuellement difficile de confirmer ou infirmer. Toutefois, les scientifiques ne désespèrent pas de trouver des matériaux supraconducteurs à température ambiante.

 

Résumé de l'historique de la supraconductivité  :

1908

Liquéfaction de l'hélium (4,2 K soit -269 °C ) par Kamerlingh ONNES.

1911

Kamerlingh ONNES découvre la supraconductivité en proposant à G. HOLST de mesurer la résistivité du mercure à très basse température.

1913

Echec du premier aimant supraconducteur.

1933

Mise en évidence du diamagnétisme des supraconducteurs (MEISSNER et OCHSENFELD).

1954

Premier aimant supraconducteur (Nb) qui fonctionna (0,71 Tesla (T) à 4,2 K).

1957

Théorie microscopique BCS de la supraconductivité (BARDEEN, COOPER et SCHIEFFER).
Théorie d'A. ABRIKOSOV des supraconducteurs de type II (réseau de vortex).

1958

Mise au point de conducteurs de type II en NbTi et Nb 3 Sn.

1960

Découverte des fortes densités de courant sous induction élevée (Nb 3 Sn).

1962

B. JOSEPHSON prédit les effets quantiques qui portent son nom et qui sont utilisés en détection ultrasensible de champ magnétique (jonctions Josephson et SQUID).

1964

Première application significative des supraconducteurs : chambre à bulles d'Argon (2,5 T dans plusieurs m 3 ).

1965

Premiers cryoalternateurs.

1968

Définition du brin multi filamentaire par le laboratoire Rutherford.

1974

Mise en service de la plus puissante chambre à bulles au CERN (830 MJ).

1982

Première images IRM, elles assureront à la supraconductivité sa première application industrielle et commerciale.

1983

Mise au point des brins multifilamentaires alternatifs.Premier accélérateur supraconducteur.

1986

BEDNORZ et MÜLLER découvrent la supraconductivité dans de nouveaux oxydes.

1987

Envolée des températures critiques.

Démarrage de TORE SUPRA, tokamak supraconducteur refroidi à 1,8 K et installé à Cadarache (France).

1995

Record reproductible à 164 K ( -109 °C ).

(Tableau tiré de http://www.lema.phys.univ-tours.fr )

La supraconductivité est donc un phénomène dont la découverte et la compréhension s'étalent sur tout le XXème siècle, permettant l'attribution de pas moins de quatre prix Nobel, ainsi que la découverte de nouveaux domaines d'utilisation liés aux nouveaux matériaux qui ont été créés. Nul doute que cette compréhension s'étendra encore sur les siècles à venir, mais voyons d'abord les principes de fonctionnement de la supraconductivité.